J4 / Thu Van Tran


J4 / Thu Van Tran

Rejet
2013


Avec une approche sculpturale, Thu Van Tran propose une expérimentation qui allie travail sur l’apparition et l’effacement. Elle présente, non pas une image figée, mais une image dans son processus de formation, et développe une réflexion sur la mémoire et l’enregistrement du réel, par empreinte directe. Dans le conteneur à ciel ouvert, l’artiste dispose sur le sol des grands formats de papiers photosensibles dont la chimie réagit à la lumière du jour. Elle y dispose des matériaux provenant de son atelier, chutes ou rejets d’oeuvres antérieures, ainsi que des fragments glanés dans la nature environnante, résidus de mer, morceaux de bois exotiques provenant du port de Caen – symptomatiques d’une histoire des exploitations coloniales, qui rejoint les préoccupations de l’artiste.

La question de la représentation dans sa dimension classique est dépassée, il ne s’agit plus de reproduire un paysage, mais d’en fixer la trace. Les changements atmosphériques s’impriment sur la feuille qui enregistre les corps qui auront fait obstacles à la lumière. L’image obtenue ne fige pas un instant, mais une durée, celle de l’exposition, offrant une alternative au rendu du caractère éphémère de la nature que les peintres impressionnistes ont cherché à transcrire. Les deux acceptions du terme « exposition » se confondent ici, puisque le temps d’insolation correspond au temps de présentation au public.

Cruciale en photographie, autant que dans la peinture impressionniste, la lumière n’est alors plus représentée, elle devient l’agent permettant à l’œuvre de se réaliser. Par un subtil jeu de transpositions, Thu Van Tran interroge le temps, les effets de la lumière qui tout à la foi révèle et use et les relations de l’art au réel dans un processus matériel incontrôlable.

Sur une proposition des églises, centre d’art contemporain de la Ville de Chelles (Île-de-France)